Financement des IPA : les responsables des paiements en détail

Dépenser 80 000 euros pour former un infirmier en pratique avancée, voilà une réalité que peu soupçonnent. Et pourtant, selon le mode d’exercice, le financement de cette spécialisation relève d’un véritable casse-tête administratif. Les dispositifs ne manquent pas, mais leur accès varie autant que les parcours des candidats. Un même établissement peut appliquer plusieurs règles, laissant certains professionnels sur le carreau, faute d’avoir coché la bonne case ou simplement compris les subtilités des critères d’éligibilité. Pendant ce temps, des enveloppes restent intactes, délaissées par méconnaissance ou désaccord interne.

Le financement de la formation IPA : panorama des options et acteurs clés

Depuis l’apparition du métier d’infirmier en pratique avancée, le financement de la formation nourrit les discussions, et parfois les frustrations. La diversité des situations, d’un territoire à l’autre ou d’un statut à l’autre, rend l’accès aux aides aussi variable qu’imprévisible. Pas de prise en charge directe par l’assurance maladie, peu d’harmonisation nationale côté ARS : chaque région, chaque structure trace sa route, souvent en solitaire.

Dans les hôpitaux publics, certains centres comme le CH Georges Mazurelle n’hésitent pas à investir jusqu’à 80 000 € par professionnel formé, sans attendre un euro des ARS. Côté privé, les établissements s’appuient sur leurs budgets maison, les fonds mutualisés de formation, ou activent l’Aide Individuelle à la Formation (AIF) via France Travail. Les IPA libéraux, eux, naviguent entre l’avenant 9 à la convention nationale, censé garantir un forfait depuis juillet 2022, et des démarches encore balbutiantes, freinées par la lenteur des mises en œuvre et l’absence de soutien direct de l’assurance maladie.

Voici les principales modalités de prise en charge selon le statut :

  • Les IPA salariés peuvent solliciter le plan de développement des compétences de leur établissement ou bénéficier d’accords locaux, à condition que l’employeur y consente.
  • Les IPA libéraux voient leurs cotisations ajustées par l’Urssaf pendant la formation, mais doivent souvent avancer les frais avant de tenter d’obtenir un remboursement partiel.
  • De nouveaux acteurs privés font leur apparition, comme AIDER Santé, qui propose un forfait parcours prévention pour soutenir financièrement les IPA.

Le paysage du financement reste morcelé. Entre fonds publics, initiatives d’établissements et ajustements des organismes sociaux, beaucoup se heurtent à des incertitudes. Ce flou ralentit à la fois la transformation des métiers et l’attractivité de la formation IPA. La modernisation du système de santé ne s’accompagne pas (encore) d’une mécanique financière à la hauteur des ambitions affichées.

Quelles démarches pour obtenir un financement selon votre statut ?

Le parcours administratif pour décrocher un financement dépend étroitement du statut professionnel. Pour les IPA salariés de la fonction publique hospitalière, la moitié des répondants interrogés évoluent dans ce contexte, la demande s’effectue auprès des ressources humaines, via un dossier complet et un projet argumenté. Chaque hôpital applique ses propres règles, parfois sans l’appui de l’ARS, comme au CH Georges Mazurelle où l’investissement individuel atteint 80 000 €. Les candidats doivent obtenir la validation de leur hiérarchie avant d’espérer une prise en charge.

Dans le secteur privé (142 témoignages), le financement s’appuie sur plusieurs leviers : plan de formation interne, recours à un OPCO (opérateur de compétences), ou demande d’aides individuelles. Les délais sont parfois longs, la sélection serrée. Un projet bien ficelé, mettant en avant les besoins du territoire, maximise les chances de succès.

Chez les IPA libéraux (139 répondants), la procédure ne ressemble à aucune autre. L’Aide Individuelle à la Formation (AIF) de France Travail doit être sollicitée impérativement avant le début du cursus. En parallèle, l’Urssaf ajuste les cotisations selon les revenus réels sur la période. Depuis juillet 2022, l’avenant 9 à la convention nationale prévoit un forfait, mais la réalité sur le terrain reste incertaine. Ici, tout passe par un dossier administratif solide et une argumentation claire auprès de l’organisme payeur.

Pour les étudiants IPA relevant de la fonction publique territoriale ou d’État, le premier réflexe doit être de s’adresser à leur employeur. Les financements externes restent rares, les dispositifs éparpillés. Chacun doit donc se montrer particulièrement vigilant dès la première année de formation, sous peine de voir le dossier rejeté par manque d’anticipation ou de compréhension des règles internes.

Réunion entre responsables médicaux et financiers autour d

Éligibilité, étapes pratiques et conseils pour maximiser vos chances

Pour démarrer une formation d’infirmier en pratique avancée, il faut avant tout être infirmier diplômé d’État (IDE) avec trois ans d’expérience effective. La HAS supervise les expérimentations, pendant que la réglementation (article 14 du décret du 12 mars 2020) permet aux IPA de la fonction publique hospitalière de faire valoir toute leur ancienneté IDE.

Les démarches à effectuer diffèrent sensiblement selon le secteur d’exercice. Pour les agents hospitaliers, il s’agit de préparer un dossier argumenté : exposer son projet professionnel, identifier les besoins du service et obtenir la validation hiérarchique. Chaque établissement fixe ses propres échéances pour le dépôt des dossiers. Du côté libéral, la demande d’AIF via France Travail doit impérativement précéder l’entrée en formation. Un contact rapide avec l’Urssaf permet d’adapter les cotisations dès le début du cursus. Pour les salariés du privé, la sollicitation du plan de développement des compétences ou de l’OPCO s’impose.

Trois conseils pour maximiser vos chances :

  • Anticipez les démarches administratives, car chaque organisme a ses propres délais qui peuvent s’étirer sur plusieurs semaines.
  • Documentez chaque aspect de votre projet IPA, en soulignant la valeur ajoutée pour la population et la cohérence avec la stratégie du centre ou du territoire.
  • N’hésitez pas à mobiliser les syndicats (FNI, SNIIL, Convergence Infirmière) qui peuvent faire valoir votre dossier auprès des financeurs.

La question de la rémunération reste sensible. Nombreux sont ceux qui jugent l’écart entre IDE et IPA insuffisant. Les attentes sont claires : hausse des salaires, création de primes, ajustement des forfaits pour les libéraux. Les récentes évolutions législatives, comme la possibilité pour les infirmiers de rédiger des certificats de décès dès mars 2025, montrent que la profession avance, parfois au rythme des combats collectifs.

Demain, la reconnaissance des IPA ne passera plus seulement par les textes ou les discours, mais par la capacité du système à soutenir concrètement ces parcours exigeants. Reste à savoir si la mécanique du financement saura, à son tour, franchir le cap et accompagner la mutation profonde du métier.

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